Chaque saison, le temps d’un week-end de janvier, la Coupe de France offre au public son lot d’histoires incroyables, et de récits superbes de clubs amateurs en quête d’exploits. Cette année encore, ceux qu’on surnomme « petits poucets », ont intrigué, détonné, et attisé la curiosité de tous.

Granville, ses 13 000 habitants, son petit port normand, et un surnom flatteur : « la Monaco du Nord », de part la proximité de la commune avec un promontoire rocheux, et la présence de plusieurs hôtels de luxe. Granville, et son équipe de football, surtout, abonnée aux exploits en Coupe de France. Dimanche, dans son petit stade Louis Dior, doté de seulement 3 000 places, les pensionnaires de National 2 (quatrième échelon national) sont parvenus à renverser les Girondins de Bordeaux, deux ans après avoir déjà atteint les quarts de finale de la compétition. Venus à bout de professionnels fragiles tant techniquement que mentalement, les normands ont obtenu le droit de faire parler d’eux plus qu’un simple après-midi dans l’année.
Un après-midi lors duquel les commentateurs se sont, comme à l’accoutumée, empressés d’énoncer les professions des joueurs, leurs vraies professions. Même si leur célébrité éclaire n’est due qu’à leur présence sur un terrain de football, il est jugé bon de rappeler qu’ils ne sont pas footballeurs. Le capitaine retournera sans doute travailler à l’usine dès le lendemain matin, alors que l’auteur du but décisif a généralement connu de nombreuses galères avant d’accéder à son statut de héros. Comme si finalement, la maladresse avec laquelle était racontée leurs quotidiens laissait entrevoir à tous la possibilité d’être, un jour, un après-midi de Janvier, mis en lumière.
Calais, un exemple pour tous
Si les origines du terme « Petit Poucet » remontent aux années 1930, et renvoie à la lutte du plus faible contre le plus fort, il a même fini par être institutionnalisé par la Fédération française de football (FFF). Depuis 2010, fort d’un partenariat avec le site de paris hippiques PMU, la FFF a rebaptisé son « Tableau d’Honneur », qui visait à récompenser le meilleur club amateur de la compétition, en « Petit Poucet PMU ». Sur un barème établi à partir de plusieurs critères – nombres de tours franchis, niveau des adversaires écartés -, le lauréat du trophée est mis à l’honneur le soir de la finale au Stade de France.

Cette quasi-fascination pour les clubs amateurs a connu son moment de gloire lors de l’édition 1999-2000. A l’époque, le Racing Calais, pensionnaire de quatrième division, renverse successivement l’AS Cannes, Strasbourg et les Girondins de Bordeaux, et obtient le droit d’emmener le peuple artésien au Stade de France. Malgré une prestation héroïque, qui les a d’abord vu mener au score, les nordistes s’étaient finalement inclinés de justesse face au FC Nantes. Au moment de soulever la coupe, le capitaine des Jaune et Vert avait même salué l’admirable parcours des amateurs, en invitant son homologue calaisien à le rejoindre. Depuis, Calais reste l’exemple. L’exemple à suivre, pour tous les footballeurs de l’ombre qui, grâce à la Coupe de France, continuent chaque année de croire en leurs rêves de gosses.
Jérémie Richalet
Crédit photo d’ouverture : Ligue Bourgogne Franche-Comté